vendredi 12 février 2010

Circuler à moto est un réel enfer à cause du trafic, de la chaleur, de la poussière, et de la circulation des trotros et taxis. Toutefois, l'exercice peut aussi être vu comme une activité fort ludique, surtout si on décide de s'imaginer être dans un jeu vidéo. Les voitures, majoritaires, respectent un certain ordre, bah pas parfait, mais y'a personne de parfait de toutes façons! Je respecte leurs conducteurs car ils sont quand même assez patients face au trafic qui est omniprésent. Les plus gros problèmes sont les taxis, ça c'est universel, donc nous ne sommes pas surpris ici, et les "Trotros", ces minivans complètement transformées en mini-bus. Les taxis klaxonnent en moyenne une fois aux dix secondes dans le centre-ville car ils veulent attirer l'attention des passants, et cela est particulièrement vrai lorsqu'ils me voient marcher sur le bord de la chaussée, portefeuille blanc à pattes. Les trotros eux, cherchent à être le plus efficients possibles, car le prix de la course est très bas, entre 20 et 60 cedis (15 et 45 cents). Le trotro, boîte de sardines géante ou s'entasse jusqu'à 18 passagers, va et vient du centre vers le coté de la route en louvoyant comme un chauffeur ivre, cherchant à engloutir les passagers sur la route ou les déglutir le plus rapidement possible. Cependant, les chauffeurs de trotros sont des pros et ne sont pas ivres du tout, mais ils n'ont pas temps à perdre. J'ai remarqué que si les motocyclettes dépassaient allègrement tous les véhicules dans le trafic en filant sur les lignes blanches, ils ne dépassaient jamais par l'extrème droite, et se tenaient plus tranquille lorsqu'ils y avaient beaucoup de trotros. Je reviens d'un 4 heures de conduite dans le centre d'Accra à faire des courses pour ma mission de la semaine prochaine et je dois dire que ça m'a bien plu. Vendredi après-midi c'est congé dans bien des bureaux et tout le monde a l'air joyeux, plusieurs m'ont par ailleurs salué ou souri gratuitement comme ça sur la rue, peut-être un peu surpris de voir un blanc-bec se faufiler dans le trafic avec sa moto bleue comme un spermatozoïde nain en quête de l'ovule face à ses compétiteurs de tailles réelle! Plus c'est petit, mieux ça passe, mais quand un gros arrive tasse-toi!

jeudi 11 février 2010

Transes protestantes

C'est vers 1h30 du matin à Accra, pas trop loin du Arts Center, en sortant avec Destin Jah Bushman d'un joyeux et très joli bar de rasta encastré dans la falaise sur le bord de la mer, l'endroit évidemment enrobé d'une fumée verte appropriée, que je vis une chose tout à fait hors de l'ordinaire. Plusieurs milliers de fidèles protestants, débordant d'une église manifestement trop petite pour la cérémonie qui se déroulait sous nos yeux, entourée d'écrans géants montrant les pasteurs au centre de la scène, vivaient une danse/transe profonde. L'atmosphère rappelant d'une manière les "raves" de chez nous, des colonnes de sons crachaient des prières amplifiées avec un maximum de distorsion et de réverbération de telle manière qu'on ne puisse rien y saisir d'intelligible. Des croyants par milliers tremblaient aux vibrations tonitruantes d'un rythme très rapide rappelant le style "gabber" européen. Certains levaient leurs bras machinalement, d'autres faisaient trembler leur partenaires, tout un chacun avait sa propre figure d'expression, mais toujours carrément hors de l'ordinaire, et laissez-moi vous dire que j'en ai vu de toutes les couleurs. Le cadre qui s'offrait à mes yeux ne pouvait se situer dans une Afrique traditionnelle mais me faisait plutôt à un film de science-fiction africaine. Tous les gens y étaient habillés bien chics et des voitures luxueuses se plaçaient à l'entrée. J'ai eu peur à un certain moment quand plusieurs ont remarqué ma présence car, évidemment j'étais le seul blanc dans cette multitude, et je sentait que les la foule n'avait plus tout à fait son esprit et que tout pouvait arriver. Heureusement, après ce qui m'a paru une heure sans pause, le "son" a été arrêté, et un pasteur est venu lancer des messages d'amour et de paix à tous. Les adorateurs ont crié leur joie de vivre, et j'ai pu ensuite poser des questions à mon voisins pour savoir qu'est ce qu'il se passait. Parait-il que tous les week-end, des gens de toutes appartenances protestantes viennent ici toute la nuit pour y vivre la transe profonde émanant d'une foi manifeste et très vivante. Destin m'attendait patiemment, lui aussi profondément troublé par cette scène, mais ne désirant pas du tout y assister.

vendredi 5 février 2010

Salutations, Tout se passe bien ici. Rosalie est là. Christelle sa cousine est aussi avec nous et nous formons une petite famille tranquille. Rosalie a commencé ses cours d'anglais cette semaine, cours qu'elle semble vraiment apprécier, tandis que Christelle, qui est malheureusement analphabète, commencera des cours privés que je lui ai offerts dès la semaine prochaine. Difficile pour une fille de 15 ans qui ne parle ni anglais ni la langue locale (le Twi, prononcer tchoui, clin d'œil à Tchae) de suivre des cours d'alphabétisation en anglais. Mais la petite, qui a vécu jusqu'à 10 ans à Abidjan en Côte-d'Ivoire, et ses dernières 5 années au Burkina, parle déjà 4 langues (Français, Mooré, Gurunsi de Réo, Gurunsi de Léo, les deux dernières étant supposément très différentes) donc ça devrait lui faciliter la tâche (en fait je ne sais pas, étant un peu nul sur le sujet des processus d'apprentissage, peut-être que ça va embrouiller son cerveau encore plus?). Elle ne connait pas trop son père. Sa mère, parce que son nouveau mari n'aime pas Christelle, l'a envoyée chez ma belle-mère. Claire, ma belle-mère l'a envoyée chez nous pour nous aider à tenir la maison comme le veut la coutume. Plus précisément, on envoie généralement une jeune fille de la famille appuyer les jeunes couples qui n'ont pas encore d'enfants ou dont les enfants sont encore très jeunes. Elle est maintenant chez nous à Accra. Elle nous donne une sacré coup de main pour le ménage et j'en suis très content. Elle m'a dit qu'elle aimerait apprendre à faire la coiffure, et j'ai donc commencé également à lui chercher un lieu où elle pourrait apprendre (et mettre en pratique ses apprentissage d'anglais, et apprendre peut-être le Twi en même temps......... car la coiffure est un art plutôt populaire pour les femmes qui ne sont pas allées trop loin à l'école). Christelle, comme Rosalie, a l'esprit ouvert, et a mangé avec joie ma soupe de nouilles et poisson à l'orientale, le confit de Canard que mes parents avaient rapporté de France, mes steaks de T-Bone barbecue à la sauce poivrée. Ça me soulage! Par ailleurs, ma soupe je l'ai faite avec un immense poisson, très joli, de 5 kilos acheté au havre de pêcheurs d'Accra samedi passé. Personne ne peut me dire son nom en anglais, mais en Twi c'est du G'Ban. Sa chair, au goût succulent, est rouge foncée et est très ferme. Son goût est prononcé mais pas du tout envahissant. La femme qui me l'a vendue, épouse du pêcheur qui l'a pêché le jour même, m'a dit que ce poisson était très rare et que sa chair était comme celle de la viande de boeuf, j'ai bien hâte de le tester en barbecue ce week-end car le poisson, long comme mon bras, a été divisé en six portions! Il y a entre autres mon ami Destin Jah Bushman, rastaman chanteur de reggae, qui est arrivé de Ouaga mardi matin avec une enseignante à la retraite originaire de Montréal. Ils sont restés deux jours chez nous. Elle partait aujourd'hui à Koforidua pour tâter le terrain afin d'y monter seule un projet d'orphelinat. Elle avait démarré un tel projet au Burkina depuis deux ans, avec une volonté sincère d'aider les enfants de la ville de Gaoua au Sud-Ouest, mais son œuvre a échoué, fondamentalement mal planifiée. Le directeur de l'orphelinat s'est révélé être un détourneur de fonds maladif, agressif, se promenant constamment avec un fouet dans l'orphelinat. Elle n'avait pas mis sur place de structure associative pour contrôler le projet. Elle n'a pas pu donc le licencier et a simplement coupé les fonds, et les enfants se sont dispersés (ou sont rentrés dans leur famille car l'orphelinat en Afrique ne ne correspond pas au même concept auquel nous sommes habitués, il accueille surtout les enfants des familles très démunies). Je commence à avoir une certaine expérience en matière de conception de projets et je le lui ai prodigué maints bons conseils et je lui ai proposé d'aller la rejoindre à Koforidua le Week-end prochain. Elle a bien apprécié et m'a fortement convié à venir l'appuyer. Destin Jah Bushman restera jusqu'à lundi ou il reprendra le car pour Ouaga, nous passerons le week-end ensemble, je pense l'amener à un bar reggae qui, paraît-il, est vraiment animé sur le bord de la plage a coté du Arts center de Accra. Destin, qui pratique aussi le commerce de l'artisanat burkinabè, est venu vendre un lot de statues de bronze et un lot de statues d'ébène; ses objets sont réellement jolis et il a bien conclu ses ventes si j'ai bien compris. Cette semaine je donnais un cours de conception de sites web avec le système de gestion de contenu web Joomla à un des employés de Pamoja. Richard, l'élève en question, est très sympathique et apprend très vite, ce qui me rend heureux car je sens que j'accomplis vraiment ma mission. Il y a toutefois un fait très intéressant le concernant : Richard est juif. Interrogeant plusieurs connaissances, je me rend compte qu'il y un réel mouvement juif naissant au Ghana. Moi qui croyais qu'il fallait sortir du ventre d'une juive pour faire partie de la gang! Je lui ai quand même posé une kyrielle de questions et son judaïsme qui me parait fortement trafiqué (mais je ne m'y connais pas bien en la matière) est très tolérant et élastique et surtout beaucoup plus inclusif. Richard me dit que sa communauté juive ghanéenne est en lien avec un mouvement israélien dont j'ai oublié le nom. Il m'a rassuré quand il m'a dit qu'il ne croyait pas les juifs doivent conquérir la terre promise sur toute sa grandeur afin de provoquer l'arrivée du messie et réaliser ainsi la prophétie ultime. Je l'ai surpris avec des pages de la kabbale, et il m'a avoué que l'aspect antique du judaïsme et sa dimension fondatrice des "peuples du livre" l'ont hautement mystifié. Si tout se passe bien, je partirai en mission dans une dizaine de jours, et ce pour deux semaines, dans sept des dix régions du Ghana, aller rencontrer les membres les plus importants de Pamoja afin de connaître leurs besoins en matière de formation pour leurs employés. Ce voyage a aussi pour but de ramasser une foule d'informations sur les organisations en question pour monter une base de données sur les membres de Pamoja. J'y sonderai aussi leurs intérêts et besoins pour un éventuel projet de création de centres d'apprentissage de métiers à des filles et des jeunes femmes analphabètes. Pamoja, le "réseau" avec lequel je travaille est spécialisé dans les méthodes d'apprentissage innovantes pour les analphabètes, alors que WUSC, l'ONG canadienne qui m'a envoyé au Ghana, se spécialise au Ghana dans tout ce qui touche à l'éducation des filles. Ce projet pourrait donc, par ma seule présence, renforcer leur partenariat, du moins c'est ce que je vise! Je dois rentrer à la maison car le soleil commence à descendre sérieusement et je n'aime pas rouler dans le trafic la nuit! Dji